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Le petit rationaliste
28 mai 2019

Les dieux au scalpel du rationalisme.

Introduction

« Le mémoire qui fait l'objet du présent volume est nécessairement imparfait. Il me sera impossible de renvoyer à toutes les autorités auxquelles j'emprunte certains faits, mais j'espère que le lecteur voudra bien se fier à mon exactitude. Quelques erreurs ont pu, sans doute, se glisser dans mon travail, bien que j'ai toujours grand soin de m'appuyer sur des travaux de premier ordre. En outre, je devrai me borner à indiquer les conclusions générales auxquelles je suis arrivé, tout en citant quelques exemples, qui, je pense, suffiront dans la plupart des cas. »1

Je suis. N'y a-t-il pas chose plus improbable dans l'univers que le simple fait d'exister, et mieux, de pouvoir se poser la question. Le seul fait de chercher à éclairer le monde plutôt que de se complaire dans des représentations figées ignorent l'évolution permanente. Les religions et les conservatismes intellectuels, sociaux et politiques tendent à empêcher de penser correctement ce monde au nom d'une mission transcendante dans un monde impitoyablement réel et immanent.

La terre est une planète rare. Elle a vu se développer le phénomène du vivant. La théorie Darwinienne donne les grands mouvements de l'évolution de l'apparition du vivant. L'une des espèces a connu une évolution qui lui a permis de cerner certaines des règles qui régissent son écosystème. L'humanité a cette particularité d'avoir développé un savoir vérifié, à la fois empirique et raisonné du monde tel qu'il est.

Cette planète est, jusqu'à preuve du contraire que je suppose probable, la seule capable d'accueillir la vie organique. L'humain, genre pan, espèce homo dite sapiens a envahi quasiment toutes les niches écologiques de la planète. C'est un animal grégaire et social. Sachant cela, la gestion de la planète est devenue un enjeu de la survie de la majorité des espèces évoluées, car l'humain est une espèce non seulement endémique, mais aussi destructrice de son écosystème. Mais l'idéologie a toujours dénié le réel pour des buts ignorants le réel.

La planète est issue d'un univers catastrophique. Les circonstances d'apparition de la terre, sans même remonter à celle de l'univers, sont d'une violence sans mesure. Le soleil est lui-même issu d'une partie d'un autre soleil. Pour preuve, la chaleur de notre soleil est insuffisante pour créer la totalité des atomes présents sur la planète. La terre, ainsi que les autres planètes de notre système solaire, sont des morceaux de matière arrachée - dans des circonstances méconnues - du soleil. Les débuts du vivant restent sujet à spéculation. L'humain est issu d'une histoire de la physique de l'univers et de la planète. Et la physique moderne apprend que l'univers et la matière sont d'une complexité, si j'ose le mot, infinie.

L'humain est une créature limitée. S'il a acquis en tant qu’espèce des connaissances concrètes sur le fonctionnement du monde, il est aussi limité par son histoire biologique, sociologique, historique et personnelle. D'autres éléments peuvent intervenir. L'individu ne peut pas échapper à ce réel qui l'entoure. Cela a pour conséquence de le mettre face à la matérialité violente du monde, même sans que l'humain intervienne. Il a la possibilité, grâce à sa conscience réflexive, d’améliorer son existence.

Car l'humain, tout capable de conscience réflexive, reste un être biologique. Sa capacité à rationaliser les éléments du réel dépend d'éléments qui ne sont pas uniquement issu de la raison. Le ressenti sensitif, émotionnel entre en compte. Et de là à dénier l'expérience vécue pour se réfugier dans des mondes déraisonnables, c'est une chose qui peut arriver à tous, mais qu'il est préférable d'éviter. Les sociétés humaines ont leur part d'aveuglement, qui n'incite guère l'individu à faire face au monde. Les mythes, s'ils ont toujours des éléments intéressants pour former et comprendre la psyché humaine, sont infondés scientifiquement. Il reste donc nécessaire de se débarrasser de ces chimères.

L'humain, je me répète, a une capacité de questionnement du réel. La tradition rationnelle a cette qualité de savoir se remettre en question. Surtout, la méthode scientifique apporte des réponses concrètes aux difficultés. La médecine soigne, avec des apports de la biologie et de la chimie. L'architecture peut permettre d'améliorer les conditions de vie. Les questionnements sur les origines de l'univers sont suffisamment fantastiques pour être épurés de tous éléments fantaisistes. Il faut expérimenter plutôt qu'affirmer une pseudo vérité destinée à se rassurer. Si la réponse reste peut-être inaccessible, l'émerveillement au monde est plus intense.

Le religieux, en tant que forme politique, entrave toute réflexion sur ce type de question, en affirmant la prédominance d'un discours sur le réel. L'idéologie y remplace le réel et ce déni du réel empêche une réflexion posée sur l'amélioration individuelle et collective de cette réalité. Les religions ont ce défaut d'affirmer, et c'est encore plus vrai dans le cas des religions écrites, que toute vérité sort des tenants de cette forme politique de sociabilisation. Fondamentalement, dans toute religion, l'enseignement ésotérique, destiné aux prêtres et aux disciples de premier ordre, est destiné à assurer le pouvoir et le confort des prêtre. L'enseignement exotérique, destiné à la masse des croyants, est destiné à fixer l'asservissement et l'obéissance à ces sectateurs. La religion est un système politique fondamentalement inégalitaire. C'est une bonne raison pour se débarrasser des dieux et de leurs soutiens.

«  Georges Orwell, l'incroyant ascétique, dont les romans nous présentent l'image inoubliable de ce qu'est profondément la vie dans un état totalitaire, n'avait aucun doute à ce sujet. « D'un point de vue totalitaire écrivait-il dans «  the prevention of litterrature », l'histoire se créé plutôt qu'elle ne s'apprend. Un état totalitaire est en fait une théocratie, et sa caste dirigeante pour conserver sa position , doit être considérée comme infaillible. » (Notez qu'il écrit cela à un moment où, près avoir combattu le fascisme pendant plus d'une dizaine d'années, il s'attaquait avec une violence double aux sympathisants du communisme.) »2

 

De la définition des dieux

Les dieux sont des créations humaines. Toute affirmation du contraire est manipulation. Ils sont des émanations des sociétés humaines. Ils sont différents les uns des autres. Il faut pour les analyser des précautions multiples, car la croyance est une forme de pensée obtuse. La religion ne tolère pas la contradiction. Les dieux vivent uniquement à travers le flot des humains qui les portent. Et ils peuvent mourir, disparaître dans le flot de l'humanité. Certains sont plus vivaces, se renouvellent dans des apparences multiples, et dont chacune est différente. Il est donc nécessaire de définir ce qu'est un dieu.

«  Les pensées et les émotions humaines proviennent d’interconnexions extrêmement complexes entre les entités physiques présentent dans le cerveau. D'après cette définition du matérialisme philosophique, l'athée est quelqu'un qui croit qu'il n'y a pas un au-delà du monde physique naturel, pas d'intelligence surnaturelle qui rôde derrière l'univers observable, pas d'âme qui survit au corps et pas de miracles- sauf dans le sens des phénomènes naturels que nous ne comprenons pas encore. »3

Tous les dieux ont un nom. Si un dieu a un nom différent d'un autre, il s'agit de deux dieux différents. Si les tenant d'un dieu affirme que le X est le même que le dieu Y, c'est pour pouvoir convertir la communauté de ce qui ne croient pas au(x) leur(s). C'est une forme de prosélytisme, qui peut aboutir à la transformation d'une croyance en une autre. Cette forme d'intégration existe dans toute les religions, et dans toutes les sociétés humaines. D'ailleurs parfois, j'y reviendrai, un dieu peut se trouver transformé, changeant sans parfois changer de nom.

« La religion, envisagée au point de vue social, est un phénomène plus complexe que la science. Chacune des grandes religions historiques présentent trois aspects:1 une Église, 2 un credo, un code de morale individuelle. »4

Les dieux peuvent être de natures différentes. Je distingue les dieux transcendants,les dieux immanents, et les dieux qui ont des éléments de ces deux natures. Les dieux immanents sont des dieux tels que les a définis Spinoza. Littéralement, le ou les dieux sont la nature. Ils ne peuvent être dissociés de la nature, donc du monde tel qu'il est. C'est la nature des dieux chamaniques. Ils sont liés à des éléments de l'environnement immédiats de la société ou de la totalité de l'univers dans sa réalité. L'esprit de la rivière, du feu, ou de n'importe quelle part sanctifié par le chaman devient le destinataire des sacrifices de la société.

La deuxième nature des dieux est le dieu transcendant. C'est un dieux qui vit dans un monde mythologique. C'est le cas des dieux monothéistes révélés. Ils sont inaccessibles aux hommes, au-dessus des hommes. Les prophètes et leurs prêtres prétendent accéder à leurs mondes, à être hors du monde classique pour pouvoir dire selon leurs intérêts quelle est la direction des hommes Ce type de dieu se manifeste uniquement suivant le bon vouloir des prêtres qui y ont un intérêt.

La dernière nature de dieux est entre les deux précédentes. Le dieu semi transcendant ou semi immanent a des qualités de chacun. Il est transcendant dans le sens où il vit dans un monde au-delà du nôtre. L'Olympe des dieux grecs ou le Walhalla des dieux scandinaves en sont des exemples probants. Ils s'incarnent, par exemple dans ces religions dans des phénomènes concrets. La foudre de Zeus ou de Wotan est très immanente. Elle incarne le dieu pour le mortel. Elle est autant le dieu que sa présence dans son arrière monde.

Après leur nature, il faut définir leurs formes. Il existe des dieux oraux et des dieux écrits. Les dieux oraux sont innombrables. Ils sont plus sensibles aux changements que les dieux écrits pour des raisons concrètes. Ils peuvent subir des pertes dans le clergé. La forme orale, quel que soit la forme de transmission, est plus malléable et plus sensible au défaut de la mémoire. De plus, les mythes ont souvent des origines réelles qui peuvent donc se reproduire, et une défaite peut en rappeler une autre au puissant, ce qui peut amener des variations de perception selon l'orateur et le spectateur.

Les dieux écrits sont moins malléables. La forme écrite les engonce dans une tradition plus rigide. Ce qui n'exclue pas des modifications parfois majeures, rendant irréconciliable deux partis des prêtres, et créant par la deux dieux différents. Les scribes ont été limités dans leur production. Et sans compter les disparitions des textes, ceux-ci pouvaient produire des erreurs dans le texte. De plus, malgré la tendance totalitaire de la religion, elle a toujours dû négocier avec les pouvoirs politiques existants, ce même dans des états théocratiques.

Les dieux se définissent aussi par leurs pouvoirs. Reprenant l'exemple de Zeus ou Wotan, ils ont le pouvoir de foudre. Les dieux monothéistes prétendent pour la plupart à l'omnipotence. Cette omnipotence et cette unicité affirmée est souvent limitée par d'autres créatures aux pouvoirs que l'on peut considérer que comme divin. Dans le cas des religions monothéistes écrites transcendantes, les dieux ont un adversaire, le diable, qui une sorte de dieu négatif. Le pouvoir s'incarne dans une flopée de serviteurs qui démultiplient le nombre de créatures para-divine. La mythologie des monothéismes est inspirée de religions qui l'ont précédée. Certains des serviteurs des dieux uniques ont les pouvoirs de dieux polythéistes. Les anges sont les messagers de ces dieux comme Hermès dans l'Olympe de la mythologie grecque antique.

Toutes ces mythologies pourraient être bien inoffensives si elles ne s'incarnaient pas dans un clergé. Les noms des prêtres sont multiples, mais leurs pouvoirs sont réels. De fait, les prêtres se déclarent seuls à avoir l'oreille ,la parole, l'interprétation et la compréhension du dieu, de l'esprit, de la lettre ou de la créature ayant les pouvoirs divins. C'est ce qui fonde leur pouvoir. Et comme les dieux sont muets, ils peuvent affirmer tout et son contraire. Pour renforcer leur pouvoir, le clergé a inventé la théologie.

La théologie est la définition juridique des désirs d'un dieu. Si deux théologies se contredisent ne fussent que sur un point, c'est que se sont deux dieux différents, même s'ils ont le même nom, la même nature et la même forme. La théologie codifie les dieux. Elle leur donne une forme politique et sociologique. Elle est définie par les chefs des prêtres. Ceux-ci, dès qu'ils ont le pouvoir, assurent leur propre domination. Lorsqu'ils existent dans un état qui n'est pas purement théocratique, ils soutiennent en général les puissants, pour que leur point de vue s'impose.

La forme juridique théocratique la plus aboutie permet la création de tribunaux et de polices religieuses. Ceux-ci utilisent tous les moyens de coercition possible. Le pire est justifié au nom du ou des dieux. L’orthodoxie se définie selon la forme du pouvoir en place, et selon les desiderata du chef. Ils peuvent justifier ainsi tous les débordements, selon leurs intérêts. Le chef et ses seconds peuvent déroger à la règle commune, au nom de leur exceptionnalité. Le croyant de base, lui, subira la violence de la communauté. L'un a tous les droits, l'autre tous les devoirs.

Les dieux ne pourraient pas exister sans la masse des croyants. Les prêtres se réservent des places sans dangers ni efforts, ils délèguent les actes durs aux croyants en leur donnant des illusions. La théologie permet d'imposer le style de vie que les prêtres disent bon, tout en assurant son propre confort. Le croyant est opposé à l'infidèle, tenant de toutes les difficultés de la société. Ainsi se justifie la violence, l'exclusion et toutes les formes de mépris possible. Il change la nature des mots conformément à son interlocuteur.

« La domination absolue qu’exerçait la norme linguistique de cette petite minorité, voire de l'ensemble de l'aire linguistique allemande avec une efficacité d'autant décisive que LTI ne faisait aucune différence entre langue orale et écrite. Bien plus : tout en elle était discours, tout devait être harangue, sommation, galvanisation. Entre les discours et les articles du ministre de la propagande n'existait aucune différence, et c'était pour cette raison que ses articles se laisser si bien « déclamer ». Déclamer [deklamieren] signifie littéralement « pérorer à voix haute », encore plus « brailler ». Le style obligatoire était donc celui de l'agitateur charlatanesque. »5

Cette analyse des dieux amène la question d'un athéisme sensé, sensible, raisonnable, raisonné et rationnel. Les conséquences de la construction humaine des dieux sont multiples. Elles sont diverses. Les prêtres ont tout intérêt à voiler la vérité, à cacher leur responsabilité dans les problèmes de la société, pour les attribuer à une partie de la population qui n'appartient pas à la communauté. C'est un bouc émissaire bien utile. Et cela maintient le peuple dans sa sujétion et son ignorance. De plus, c'est une manière d'éviter que l'individu se construise et surtout cherche des moyens de changer sa situation.

 

Pour un athéisme tranquille : pourquoi être athée.

Être un athée raisonnable, c'est cherché à vivre. Être un athée raisonné permet de reconnaître ses limites. Être athée rationnel, c’est apprendre à poser des questions pour tenter de comprendre son monde. Pour cela, il est nécessaire de se créer sa propre éthique, sa propre morale. C'est s'éduquer soi-même pour mieux comprendre et appréhender le monde tel qu'il est. C'est apprendre l'altérité ainsi qu'à s'accepter. Certaines formes de l'athéisme ont parfois mené aux pires excès. Le fascisme sadien ou l'athéisme calculé de Staline peuvent mener au pire. Il faut donc tenir compte de ces horreurs pour tenter une forme plus vivable. Si le mot justice peut être interprétée de façon purement juridique, il peut aussi traduire l'espérance travaillée d'une meilleure équité entre les êtres humains. La question est de savoir comment équilibrer la manière de gérer le monde pour que chacun s'y intègre et puisse s'y épanouir.

L’athée a conscience que la religion n'est qu'un résultat. La peur, sans même parler de celle de la mort, est le substrat sur lequel se nourrissent les prêtres. Il se contreficherait bien des croyants, si ceux-ci lui rendaient la pareille. Mais, je l'ai déjà dit, la religion exclut, souvent de façon violente ceux qui n'y adhèrent pas. C'est un endoctrinement qui a des conséquences politiques, économiques sociales, éducationnelles, pour dire simplement humaines. Les religions excluent, une haute moralité de l'athéisme a pour but d'inclure et d'éduquer.

« Le sentiment religieux est loin d'inspirer toujours des sentiments agonistiques. Cependant, l'histoire des hommes a été par un grand nombre de massacre d'origine religieuse. Et ce n'est pas un hasard. En effet, la croyance en un dieu, en particulier s'il est considéré comme unique est idéal pour imposer l'extrémisme. Elle est irréfutable et justifie absolument tout, dans la mesure où, si dieu existe, c'est lui qui fonde les règles du réels, la notion de morale, etc. Se référer à un concept absolu favorise l'incommensurabilité entre les valeurs qu'il est censé inspirer et celles qui prévalent dans l'esprit de citoyen ordinaire. Les dilemmes moraux sont donc de peu de poids lorsqu'on prétend son action sur la volonté d'une entité donnant son sens même du vrai, au bien et au beau. Toute personne persuadée de détenir de vérité aura, en raison de l'idée fallacieuse selon laquelle la vérité est toujours unique la tentation de vouloir la voir devenir monopolistique sur le marché cognitif. »6

La croyance est limitative. Elle emprisonne l'esprit dans les bornes de ses convictions. Entre le réel et la mythologie qu'elle porte, le choix se porte toujours sur la faveur des prêtres. La persuasion de ceux-ci amènent le simple sectateur à remettre le réel en doute, plutôt que la parole du zélateur. Les contrecoups de ce comportement sont multiples et extrêmement concrets. Un exemple précis est l'attitude des religieux envers les femmes. Elles sont considérées comme des éternelles mineures. Les seules responsabilités qui lui sont reconnues sont toujours négatives. J'ai déjà parlé ailleurs de ceux qui ne font pas parti de la communauté.

Le problème de la croyance est qu'elle est totalisante. Elle se mêle de tous les aspects de la vie quotidienne, et pas dans le but de la simplifier. Le déni du réel au nom de la révélation du prêtre est un fondement de toute religion. Et cela créée des postures idéologiques dangereuses. L'exclusion de certains types de personnes au nom de leur naissance est un classique Le système religieux est basé sur l'inclusion et l'exclusion.

« Ce n'est pas que les idées soient fausses. Simplement, elles sont simples. Or, je ne connais pas de problèmes complexes qui, lorsque la question est posée clairement, ne deviennent encore plus complexes. »7

Les disciples sont les premiers. Ils ont tous les droits. Pire, plus l'individu s'éloigne du chef, plus les devoirs dominent. La prison psychologique devient sclérosante. Elle empêche de voir l'ascendant de l'idée sur les vraies problématiques de l'individu, ainsi que de la société qu'il compose. Le changement nécessaire est refusé. L'évolution est quasi impossible. Et si elle possible, elle entraîne des mouvements sociaux qui peuvent être dangereux.

Un athéisme bien compris pourrait créer une forme de sociabilité forte. C'est une réflexion sur les formes politiques. Il doit viser l'intégration pour former une société saine. La doctrine morale est une question nécessaire. Une éthique à la fois contraignante, dans une optique libertaire est un objectif complexe. C’est cette contradiction apparente qui doit former un scepticisme raisonnable, raisonné et rationnel. Cet objectif est l'objet du prochain chapitre.

L'athéisme se veut totalement immanent. Il est la chaire de l'individu qui doute. Il cherche les questionnements, auxquels parfois il tente de répondre. Le réel est son point d'appui. Mais le réel est seulement changement, évolution et renouvellement. C'est un ancrage éternellement instable. Il faut donc être capable d'interpréter le ressenti. Il n'existe aucune grille de transcription parfaite. Mais il est toujours possible de mener un travail pour expliquer, tenter de comprendre le monde et de vivre en meilleure entente avec ses congénères.

L'athéisme doit éviter, dans la mesure du possible, de préjuger du réel. Malgré cela, l'athée est issu de la société humaine qui l'a vu formé. Il subit la pression des religions. La médiation humaine se forme au sein d'une société, d'une époque, d'une éducation, et de tous les autres éléments qui forment une possibilité, celle de mettre en perspective le dogme social, économique, politique. C'est un élément essentiel à toute pensée de l'incroyance, d'un sain scepticisme. Il est probablement nécessaire d'avoir des croyants pour avoir des mécréants.

La chaire de l'individu, du peuple, de l'animal humain ne peut être déniée que pour imposer l'illusion, l'ignorance, l'impossibilité d'agir. L'agir au quotidien, le respect altruiste des différentes parties en présence peut créer cette présence d'une écoute. Sans cette écoute, le conflit est imminent. Sans ce partage, cette communion, communication et coopération, le savoir ne peut se diffuser et l'ignorance reste le ferment de toute violence. C'est donc pour cette raison, plus fondamentale qu'il faut un athéisme militant.

 

Pour un athéisme militant : comment être athée

C'est tout d'abord pour lutter contre cette dérive qu'entraînent les religieux de se permettre ce qu'ils interdisent aux autres. Les violences sont infligées au nom du vivre ensemble, et la paix des mots devient la guerre dans les actes. Les religieux imposent des règles de violences institutionnalisées, que ce soit par la tradition ou par la loi. Cela génère des frustrations qui enchaînent les participants dans une spirale de dépendance de plus en plus grande. La fuite nécessaire de l'esprit face à un univers sur lequel la maîtrise de l'humain peut être considérée comme nulle et non avenue, il est compréhensible que parfois des réponses rassurantes pour le confort mental du spectateur du monde soit parfois nécessaire. Mais il faut faire face au réel, et tenter de comprendre ce souffle qu'est la chandelle d'une vie humaine.

« Les croyants , passe encore ; celui qui s'en prétend le berger, voilà trop. Tant que la religion reste une affaire entre soi et soi, après tout, il s'agit des névroses, psychoses et autres affaires privées. On a les perversions qu'on peut tant qu'elles ne mettent pas en danger ou en péril la vie des autres.

Mon athéisme s'active quand la croyance privée devient une affaire publique et qu'au nom d'une pathologie mentale personnelle, on organise aussi le monde en conséquence. »8

Comme questionnement au monde tel qu'il est, il y a les sciences. Elles sont basées sur l'expérience, l'accumulation des connaissances, la comparaison des expériences, l'observation des résultats de l'interaction qui ont existé dans le partage humain. De l'autre côté, il y a les croyances. Les deux sont culturelles, les deux n'ont pas la même valeur. La croyance est issue de l'éducation, le savoir de sa remise en question. L'éducation est pourtant aussi nécessaire pour transmettre le savoir scientifique. Mais le langage transporte ses propres représentations. Et une même langue évolue suivant son histoire passée et présente, voir lorsque le politique est pensé comme instrument de manipulation. La culture subit ses transformations de façon continue, faisant de la science un outil d'évaluation fort du réel, sans pour autant être soumis à ses propres limitations.

« Comprendre, toutefois, ne signifie pas nier ce qui est révoltant et ne consiste pas à déduire à partir de précédent à ce qui est sans précédent : ce n'est pas expliqué des phénomènes par des analogies et des généralités celle que le choc de la réalité s'en trouve supprimé.. Cela veut plutôt dire un examen et porter en toute conscience le fardeau que les événements nous ont imposés, sans nier leur existence ni accepter passivement leur poids comme si tout ce qui est arrivé devait fatalement arriver. Comprendre, en un mot, consiste à regarder la réalité en face avec attention, sans idée préconçue, et à lui résister quel que soit ou est pu être cette réalité.'9 »

Le savoir est cumulatif. Il évolue avec la technique. Il change selon l'époque, se créée avec les hommes et leurs représentations. Et il doit aussi savoir s'abstraire de ses représentations. Il est sujet aux remises en cause consciente. C'est le fameux doute raisonnable et raisonné qui fonde les sciences. Il ne s'agit pas de remettre en doute la théorie de la gravitation de Newton, il s'agit de la réinterroger et de montrer ses limites avec Einstein. Il ne s'agit pas de remettre en doute l'évolution darwinienne, il suffit de la faire évoluer par les découvertes qui ont été faites depuis. Il se doit aussi se trouver des dispositions collectives. Le scepticisme est une forme ancienne de pensée. Mais c'est dans sa forme moderne du rationalisme qu'il a atteint sa maturité. Le rationalisme a cet avantage qu'il ne refuse aucune question. Il se voue à la recherche et particulièrement scientifique. La science est la seule manière d'envisager les règles de façon saine. Elle doit toujours envisager la possibilité de voir ces acquis mis en cause par les nouvelles formes d'observation.

Les sciences sont une forme de problématique sans cesse renouvelée. Elle se pose et s'impose d'abord comme un retour sur elle-même. Parce que la science se doit de se fonder comme scientifique. C'est ce qui s'appelle l’épistémologie. Cette pensée est profondément récursive et permet de penser la science au-delà de la science. Son retour sur elle-même permet un approfondissement des fondements et des limites de la pratique et de la pensée scientifique.. La réflexion scientifique sur le phénomène humain de la science doit sans cesse évoluer. Elle doit tenir compte des connaissances acquises et user du doute raisonnable. Et pour cela, il faut sans cesse tenter de comprendre, appréhender et essayer de faire face au réel pour en donner une description qui soit basée sur les événements réels.

L'athéisme raisonnable se pose la question éducationnelle. La psychologie, l'éthologie, les phénomènes sociologiques et la prise en compte tous les éléments qui constituent le milieu écologique individuel et collectif sont constitutifs de toutes réponses pour envisager une pédagogie. Le savoir être, le savoir culturel, le savoir faire technique sont autant de formes dont il faut tenir compte pour avoir un large éventail pour former l'esprit humain à faire face au réel.. Mais la vraie problématique est d'acquérir suffisamment de ses réflexes pour pouvoir apprendre soi-même. La masse critique de savoirs et d'automatismes intellectuels et culturels reste un facteur important.

Le questionnement du monde se fait en mise en perspective, voir en cause, des connaissances scientifiques. La connaissance se construit. Elle est de fait un retour éternel sur elle-même, ce qui définit toute réflexion. Il est lié à son implication dans le monde, à son ressenti physique et mental.

« Peut-être peut on saisir ici un exemple de la méthode que nous proposons de suivre pour une psychanalyse de la connaissance objective. Il s'agit en effet des valeurs inconscientes à la base même de la connaissance empirique et scientifique. Il nous fait donc montrer la lumière réciproque qui va sans cesse des connaissances objectivées et sociales aux connaissances subjectives et personnelles, et vice versa. Il faut montrer dans l'expérience enfantines. C'est ainsi que nous serons fondés d'un inconscient de l'esprit scientifique, du caractère hétérogène de certaines évidences, et que nous verrons converger, sur l'étude d'un phénomène particulier, des convictions formées sur les domaines les plus variés.»10

 

En conclusion

Il est impossible de conclure. Le rêve est nécessaire à l'humain, et la croyance ne sera jamais probablement totalement détruite. Toute éducation est issue d'une représentation du monde. Et si celle-ci peut être issue d'éléments concrets, cela n'empêche pas ces représentations. Elles peuvent être faussées. C'est donc un combat sans fin. Pourtant, il est nécessaire d'accéder à une maturité de la réflexion, de ce retour éternel sur le réel. Mais surtout, il faut faire combattre la religion, qui de par sa nature est sectaire.

Quand une personne ou un groupe s’attribue le pouvoir de décider ce qui est vrai de ce qui est faux, alors il faut se lever et résister. D'où la nécessité d'un doute qui reste constructif. L'individu peut alors progresser, ce qui n'est pas le cas quand certains le limitent son horizon. Le monde peut être racontée tel qu'il est même s'il faut un langage qui redéfinisse le réel pour le comprendre. Si la religion s'est basée sur une représentation faussé par les peurs et les ignorances. La curiosité, le questionnement, l'entretien des savoirs sont le seul moyen d’affronter les prêtres entretenant les illusions nécessaires à leur pouvoir.

Quand à moi, j'en reste à une maxime de Pierre Desproges assez définitive, Veuillez croire,moi pas.

 

Fabien Micolod

1 Charles Darwin : Texte établi, Daniel Becquemont, trad Edmond Barbier/ L'origine des espèces ; au moyen de la sélection naturelle ou la préservation des races favorisées dans la lutte pour la vie .- Paris, GF Flammarion, ed mise à jour 2008. p 48

2 Christopher Hitchens, trad. Ana Nessur/ Dieu n'est pas grand ; comment ma religion empoisonne tout.-Paris, Belfond:2009 [Anglais 2007]. p 317

3 Richard Dawkins, Trad de l'anglais par Marie-France Desjeux/ Pour en finir avec dieu.- Laffont Perrin, Paris, 2008 [Anglais, 2006]. p 25

4 Bertrand Russell, trad. Philippe-Roger Mantoux/ Science et religion.- Paris, Gallimard ; 1971.- Coll. Essais. p9

5 Victor Klemperer/ LTI , la langue du IIIe Reich : Carnet d'un philologue. Paris, Albin Michel, 1997. Première publication allemande 1947, DDR. Pp 48-49

6 Gérald Bronner/ la pensée extrême : comment les hommes ordinaires deviennent des fanatiques.- Paris : PUF, 2016. pp170-171

7 Boris Cyrulnik/ Sous le signe du lien : une histoire naturelle de l'attachement.- Paris. ; Fayard, pluriel.- (1ere éd. Hachette littérature, 1989. p 191

8 Michel Onfray/ Traité d'athéologie:Physique de la métaphysique. Paris, Grasset : 2005. p 29

9 Hannah Arendt/ Les origines du totalitarisme : Eichmann à Jérusalème,- Paris, Gallimard, 2002.- Quarto. p 181

10 Gaston Bachelard/ La psychanalyse du feu. Paris : Gallimard, 1949. Folio essais. P 27

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Commentaires
F
Il est vrai que l affirmation d'un discours sur la création fonde toute religion, ce qui me laisse voir la où il reste des faiblesses dans mon texte.<br /> <br /> Quand au fascisme (une de mes notes vient d'Hannah Arendt), c'est plutôt que le fascisme est un déscendant du système théocratique. Et pour une fois, j ai fait passer les dcauses aavant les conséquences).<br /> <br /> Si l'aveuglementt et le résultat de celui-ci, la prétention à valeur unique de l'affirmation relgieuse n apparaît pas, c'est que je dois encore clarifier le propos.<br /> <br /> Merci Yvon.<br /> <br /> Fabien.
Répondre
Y
Remarquable. Il y manque selon moi, l'exposé du contenu fasciste des religions dont la doctrine s'appuie sur le créationnisme. Non seulement le créationnisme est un crétinisme, il est surtout la forme la plus abjecte du fascisme. Votre réflexion, enfin celle que vous relayez, soit évite, soit ne voit pas ce point, soit n'en perçoit pas l'importance. N.B Je dois relire bien plus attentivement.
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Le petit rationaliste
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